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  • Photo du rédacteurMartin Givors

Vous avez dit "Qi Gong" ?

Dernière mise à jour : 24 août 2022

Article rédigé en partie à partir de l'ouvrage de l'anthropologue David Palmer : La fièvre du Qigong, 2005


L'emploi du terme "Qi Gong" (ou Qigong) s'est généralisé en Chine au début des années 1950 afin de rassembler sous une même appellation des pratiques de respiration, de méditation et d'entraînement corporel parfois très différentes (voir l'article "Trois manières de pratiquer le Qigong"). Ce choix fut réalisé par le Parti Communiste Chinois qui était alors désireux d'extraire ces pratiques des milieux religieux/spirituels auxquels elles étaient alors associés, afin de les adapter aux évolutions de la société chinoise.



Cette adaptation de la pratique s'est réalisée à travers trois objectifs :

  • séculariser le Qi Gong (= le laïciser), en le délestant des "superstitions" et des "croyances mystiques"

  • mettre l'accent sur son potentiel thérapeutique (ou de préservation de la santé),

  • en faire un objet d'étude scientifique pour prouver son efficacité


Cet élan fut interrompu lors de la Révolution Culturelle (1967-1976), lorsque les traditions furent renversées et discréditées au nom de la modernisation du pays voulue par Mao Tse Toung et une partie de la jeunesse chinoise (les "Gardes Rouges"). De nombreux maîtres et praticiens furent tués lors de cette période, d'autres s'exilèrent.

Après l'éviction de Mao, la Chine fut prise d'un engouement sans précédent pour ces pratiques jusqu'à la fin des années 1990, dans un épisode que l'on connaît aujourd'hui sous le nom de "la Fièvre du Qi Gong". A cette époque, de nouveaux maîtres créèrent des "méthodes" et de vastes programmes pédagogiques (et économiques) afin de transmettre le Qi Gong au plus grand nombre, et non plus seulement auprès d'une poignée de disciples, comme c'était jadis le cas dans le système traditionnel (transmission de maître à élève).


Le docteur Peng He Ming,, créateur de la méthode du Zhineng Qigong dans les années 1980.


La fièvre fut telle qu'à la fin des années 1990, l'organisation du Falung Gong (l'un des styles dominants de cette période, aujourd'hui considéré comme sectaire sous certains aspects) s'imposait progressivement comme une puissance politique à part entière, capable d'influer sur la vie interne du pays. Pour son leader, Li Hongzhi, le Qi Gong n'était pas seulement une méthode pour cultiver les corps, mais également les vertus morales, et la corruption d'une partie de l’État chinois devint peu à peu la cible de ses discours. A la suite d'une manifestation du Falung Gong à proximité du quartier général du Parti Communiste Chinois, le mouvement fut interdit et éradiqué.

Depuis lors, l’État administre et régule la pratique du Qi Gong : certains styles officiels et agréés sont transmis au travers d'une organisation ministérielle de promotion du "Qi Gong santé", tandis que d'autres donnent lieu à des "compétitions sportives" (sur le modèle des arts martiaux), et d'autres encore se perpétuent plus confidentiellement.


A l'échelle internationale, cette prise en main de la transmission du Qi Gong a eu pour effet d'ordonner la transmission en homogénéisant les styles (car s'il existe un Ba Duan Jin officiel, cet enchaînement connaît en réalité d'innombrables variations en Chine, comme le vin en France ?).


Dans sa lutte culturelle contre l'influence américaine, la Chine semble aujourd'hui avoir saisi le potentiel du Qi Gong. Si elle le développe certes sur les plans scientifiques et médicaux, elle connaît également sa valeur stratégique et économique, et veille toujours à ce qu'il ne déborde plus le périmètre médical, sportif et culturel qu'elle lui a attribué.

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